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Le clos-masure : l'habitat vernaculaire traditionnel du Pays de Caux et attribut majeur du paysage


Le clos-masure, une organisation spatiale originale


Le clos-masure répond à une organisation spatiale particulière qui en fait toute son originalité et peut-être son universalité. Schématiquement, le clos-masure est un corps de ferme entouré par des alignements d’arbres plantés sur talus dénommé dans le pays de Caux « fossé ». Dans la cour intérieure se trouvent les différents bâtiments (grange, charreterie etc…) qui composent l’exploitation agricole ainsi que la maison d’habitation. Tous ces bâtiments sont dispersés dans la cour afin, dit-on, d’éviter les risques d’incendies et la propagation des maladies. La cour est plantée d’un verger (pommier, poirier…) et une mare est présente.
Généralement, on comptabilise deux entrées, l’une vers le corps de ferme et l’autre vers les champs.
Malgré l’expansion du modèle à l’ensemble du territoire cauchois, on rencontre de part et d’autre du pays de Caux, des clos-masures de tailles différentes et de formes architecturales variées dans leurs compositions et leurs matériaux de construction. Certains sont en briques, d’autres en pan de bois, en silex, ou bien encore en torchis, souvent ces matériaux sont mélangés. L’organisation spatiale a été généralisée à l’ensemble du pays de Caux mais chaque clos est unique.


 

Des origines encore incertaines

Biens des auteurs se sont penchés sur la question de l’origine des clos-masures. Pourquoi cette forme d’habitat s’est-elle implantée en pays de Caux et pourquoi est-elle unique au monde ? Est-ce un héritage des Calètes dont le pays de Caux tire son nom, de la culture gallo-romaine ou des invasions scandinaves ? La théorie actuellement prégnante semble être que le clos-masure résulte de la conjugaison des différentes cultures successives présentes en pays de Caux au cours des siècles.

Clos-masure ou cour-masure ?

Le terme masure renvoie à l’origine à une petite maison modeste et vétuste. En réalité, ce terme a été galvaudé et la masure devient l’appellation de l’exploitation agricole et plus particulièrement de la maison d’habitation. Le terme clos ou cour lui renvoie à un espace fermé, clôturé. Il semblerait que l’appellation clos-masure ou cour masure est assez récente et que les paysans eux-mêmes utilisaient comme appellation quotidienne : « la cour ». Un paysage cauchois évolutif et en mutation.
 
Les clos-masures par leur répétition sur un même territoire forment le paysage unique du pays de Caux, mélange entre l’openfield et le bocage. L’horizon n’est jamais lointain dans cette campagne où des clos-masures sont présents avec une forte densité. Le clos-masure, structure agricole multiséculaire a résisté à toutes les évolutions du temps et révolutions qu’a pu connaitre la France (Révolution française, industrielle, agricole…) pour arriver jusqu’à nos jours. Néanmoins depuis la Seconde Guerre mondiale, l’évolution s’est accélérée pour arriver vers une mutation du paysage. L’augmentation des réseaux routiers et ferroviaires, l’accroissement de l’urbanisation et notamment de la périurbanisation en périphérie des agglomérations qui « grignote » sur les petites communes rurales mais aussi les sources d’énergie (pylône électrique, éolienne…) ont modifié le paysage.



Certains clos ont été démembrés, divisés en parcelles pour de nouvelles constructions. Des rideaux d’arbres et des « fossés » ont partiellement ou totalement disparu. Les bâtiments qui composent les clos sont soit restructurés ou modifiés pour répondre aux nouvelles normes écologiques et agricoles, soit laissés à l’abandon pour en construire des plus modernes. Les clos situés dans les hameaux, isolés des villages semblent toutefois être les plus épargnés par l’évolution du temps.