Les élus départementaux votent le budget primitif
Après le débat en février autour des grandes orientations budgétaires, les élus départementaux se sont retrouvés dans l’hémicycle ce jeudi 28 mars pour une nouvelle étape dans la préparation du budget 2024 : le vote du budget primitif.
« C’est un budget sérieux, efficace et solidaire », résume le rapporteur Laurent Grelaud, vice-président du Département, en charge notamment des finances, en dépit d’un contexte national et international particulièrement dégradé. Confrontés à la fois à une chute de leurs recettes liée notamment à la mauvaise conjoncture économique et à la persistance de la crise immobilière, d’une part, et à une hausse structurelle de leurs dépenses de fonctionnement, d’autre part, beaucoup de Départements se sont trouvés en effet cette année en difficulté, voire pour certains dans l’incapacité de boucler leur budget dans le calendrier imparti.
Le Département de la Seine-Maritime n’est pas dans ce cas de figure, même si l’environnement très difficile incite à « la vigilance et à la prudence », rappelle Laurent Grelaud ; et ce, « grâce à la gestion sérieuse que nous avons menée depuis 2015, qui a permis de réduire l’endettement, de 1,250 milliard d’euros à moins de 700 millions d’euros aujourd’hui », précise le Président Bertrand Bellanger.
Un effet ciseaux
Petit rappel de quelques fondamentaux : pour conduire ses missions, le Département bénéficie de plusieurs sources de financement dont principalement les dotations de l’État et les produits de la fiscalité. Ce sont ces derniers qui inquiètent notamment, avec la forte baisse enregistrée depuis un an des Droits de mutation à titre onéreux (DMTO), droits prélevés sur les transactions immobilières, tombés en deux ans, de 2022 à 2024, de 215 millions d’euros à 155 millions d’euros, soit un manque à gagner pour la collectivité de 60 millions d’euros. De même, les mauvaises perspectives de croissance risquent d’orienter à la baisse la fraction de TVA reversée par l’État aux Départements (après la suppression notamment de la CVAE – cotisation sur la valeur ajoutée de entreprises - au 1er janvier 2023 et de la taxe foncière sur les propriétés bâties), pesant encore davantage sur le niveau des recettes.Des ressources en contraction donc, et en regard une augmentation structurelle des dépenses de fonctionnement sur laquelle le Département n’a pas la maîtrise (liée notamment à des mesures gouvernementales de revalorisation salariale, d’augmentation du RSA, du point d’indice, aux effets de l’inflation, ou encore au coût de la facture énergétique). « Avec un excédent de clôture 2023 inférieur de 80 millions d’euros par rapport à 2022, chiffre le plus bas depuis 2018, il en résulte une forte dégradation de notre épargne », constate Laurent Grelaud qui ajoute que malgré tout, le budget 2024 s’est voulu « audacieux » en conservant un « haut niveau d’investissement ». Une nécessité pour préparer l’avenir du territoire.
Un haut niveau d’investissement
Ce sont ainsi 306 millions d’euros (un montant en progression de + 6,27 %) qui ont été inscrits à ce budget primitif, ventilés de la façon suivante : 200 millions d’euros pour les projets menés par le Département en tant que maître d’ouvrage et 100 millions pour accompagner les projets du territoire.Pour arriver à ce résultat, « toutes les lignes budgétaires ont été réinterrogées en 2024, grâce à une mobilisation de l’ensemble des acteurs tant politiques qu’administratifs », précise le vice-président. Avec cette ambition d’ajuster au mieux les moyens financiers aux missions particulières qui sont celles du Département et en assurant la continuité de ses actions.
Le budget primitif 2024 de la Seine-Maritime s’établit donc à 2,202 milliards d’euros, en augmentation de + 5,92 % par rapport à celui de 2023. Il recentre l’action départementale sur quelques grandes thématiques.
Les Solidarités humaines
La vocation première du Département, collectivité de proximité, est d’accompagner ses habitants à tous les âges de la vie. Fixées à 981 millions d’euros (16 millions de plus qu’en 2023), les dépenses du secteur social (en fonctionnement et en investissement) constituent ainsi et de loin le premier poste budgétaire. Pour répondre à l’enjeu du vieillissement, 418 millions sont inscrits pour le financement de l’autonomie dont 114 millions d’euros pour l’APA à domicile et 125 millions d’euros pour l’APA en établissement. À cela s’ajoute une revalorisation de la tarification des Ehpad à hauteur de 5 %.Un effort de 53 millions d’euros supplémentaire a également été consenti depuis 2019 au budget consacré à l’enfance-famille, dont la protection de l’enfance, qui atteint en 2024 les 238 millions d’euros. Un secteur aujourd’hui en tension qui a été au cœur d’une réflexion collective durant toute l’année 2023 à travers les Rencontres Départementales pour la Protection de l’Enfance (RDPPE) et qui a fait l’objet en 2023 d’un plan d’urgence de 10 millions d’euros supplémentaires.
En 2024, l’année de l’enfance laisse place à l’année du handicap pour lequel le Département mobilise 172 millions d’euros au titre de ce budget primitif, autant pour l’aide à domicile que l’hébergement.
Par ailleurs, avec 280 millions d’euros d’inscription budgétaire (dont 260 millions d’euros pour le versement du Revenu de Solidarité Active (RSA)), une politique volontariste en matière d’insertion cible spécifiquement les bénéficiaires du RSA pour favoriser leur retour à l’emploi par un accompagnement personnalisé et un recensement systématique des besoins du territoire. Un outil a été mis en place à cet effet : la plateforme Job76 qui a permis en 2023 à 640 bénéficiaires du RSA de retrouver une activité (emploi ou formation). Rappelons qu’en 2024, le département recense 38 300 bénéficiaires du RSA dont la moitié ont moins de 40 ans (et un quart ont moins de 30 ans).
Enfin, le Département agit en faveur des familles les plus modestes en prenant à sa charge jusqu’à 90 % du coût du repas de cantine des 8 500 élèves bénéficiaires de l’Aide aux collégiens pour la restauration et l’internat (ACRI). Une harmonisation du prix du repas à 3 €, pour un coût réel autour de 12 €, a également été décidé en 2023.
Accompagner les territoires
Le Département est présent sur l’ensemble du territoire et accompagne son développement en même temps qu’il en assure la cohésion. Axe majeur de la politique départementale, l’aide aux investissements des communes et des groupements de communes a été fortement accrue depuis 2015, passant de 7 millions d’euros à près de 30 millions d’euros en 2024 (hors contrats territoriaux de développement), avec une aide orientée tout particulièrement vers les communes de moins de 5 000 habitants qui absorbent plus de la moitié (55 %) de l’enveloppe. Pour faciliter l’accès aux dispositifs de subvention, les démarches ont été considérablement facilitées : taux de base unique de subvention de 30 %, absence de date butoir pour le dépôt des dossiers et instruction des demandes « au fil de l’eau ».Le Département est tout particulièrement attentif au maintien de services publics de proximité sur les territoires les plus éloignés, comme en témoigne l’expérimentation lancée en 2023 dans la vallée de la Bresle de la 76 mobile, bus de service public itinérant pour aller à la rencontre des populations les plus isolées.
Il investit aussi pour la sécurité des habitants comme partenaire privilégié du SDIS (Service départemental d’incendie et de secours) en contribuant à son budget à hauteur de 49 millions d’euros en 2024, un montant appelé à augmenter d’un million d’euros chaque année jusqu’en 2028. Plus de 12 millions d’euros d’aides sont également consacrés aux investissements dans les équipements de sécurité.
Enfin, la collectivité s’attache à soutenir dans le milieu rural les pratiques agricoles les plus vertueuses à travers son Aide aux petits investissements qui permet de financer jusqu’à 45 % du coût d’un équipement plafonné à 10 000 €. L’enveloppe dédiée à ce dispositif s’établit à 2 millions d’euros, un montant presque doublé en l’espace de 4 ans, qui profite notamment aux éleveurs et plus particulièrement aux investissements liés à la pénibilité du travail.
Favoriser la culture, le sport et la jeunesse
Le budget primitif est examiné en même temps qu’est présenté le plan Culture qui définit la politique culturelle du Département pour la période 2024-2029. Une enveloppe de 11,8 millions d’euros lui est attribuée chaque année dans le but d’accompagner les acteurs culturels du territoire, de restaurer et de valoriser le patrimoine local. Dans ce domaine, une attention particulière est portée à la lecture publique, en lien avec la Médiathèque Départementale de la Seine-Maritime (MDSM) qui joue un rôle moteur pour animer le réseau des 250 bibliothèques communales et intercommunales. À cette action au long cours, s’ajoutent plusieurs opérations phares favorisant l’accès à la lecture : la bibliothèque numérique Livre & Vous à destination des collégiens, Lire à la plage qui accueille chaque été 45 000 lecteurs dans ses 13 cabanes à lire ou encore le festival littéraire itinérant Terres de Paroles.De même, la politique sportive mobilise des moyens importants, qui prennent tout leur sens en cette année olympique. 11 millions d’euros sont inscrits au budget primitif 2024 pour mener des actions de promotion du sport, soutenir le sport de haut niveau ou encore développer des pratiques sportives accessibles à tous.
À noter que sur un budget de 217 millions d’euros (fonctionnement et investissement), dédié à l’éducation, à la culture, à la jeunesse et au sport, plus de 168 millions d’euros sont fléchés vers les collèges publics.
Accélérer la transition énergétique et climatique
Avec son Plan Climat76, le Département s’est engagé pleinement dans la transition climatique et énergétique. Plusieurs crédits sont ainsi inscrits dans le budget primitif pour accompagner les habitants mais aussi les communes dans cette transition. Pour exemples : une enveloppe de 5 millions d’euros pour l’amélioration et l’adaptation de l’habitat des particuliers dont l’aide à l’habitat durable, étendue depuis 2022 aux classes moyennes, 10 millions d’euros en faveur de l’écomobilité (5 millions pour le prolongement du tramway de la métropole du Havre et 5 millions pour le renouvellement de la flotte de bus sur la métropole de Rouen) ou encore le soutien du Département aux filières courtes (avec la plateforme Mon panier76) dans le cadre de son Projet Alimentaire Territorial (PAT) adopté en 2020.En plus de son Plan Ambition Collège, le Département a par ailleurs réservé une enveloppe de 30 millions d’euros pour mettre à niveau dans le cadre du décret dit « tertiaire » de 2019, l’ensemble des bâtiments de plus de 1 000 m2, dont principalement les collèges de la Seine-Maritime (soit environ 1 million de m2) tant sur le plan de l’éclairage, du chauffage que de l’isolation.
Enfin, 4,8 millions d’euros sont mobilisés pour les opérations de valorisation et d’aménagement des espaces naturels sensibles (ENS), 600 000 € en faveur du plan Arbres et plus de 5 millions d’euros sont inscrits au titre de la politique de l’eau.
Développer et maintenir les infrastructures
Avec un budget dédié de 60 millions d’euros, le Département investit pour la sécurisation et la modernisation de son réseau routier, emprunté chaque jour par les habitants de la Seine-Maritime. Plus de 8 millions d’euros sont également mobilisés pour les opérations d’entretien.15 millions d’euros sont en outre fléchés pour la valorisation des ports départementaux. En reprenant en gestion la criée de Fécamp, la collectivité a montré sa volonté de maintenir une filière pêche sur le littoral. Dans la continuité de cette décision, le mode de gouvernance de ces ports départementaux (port de pêche du Havre, de Fécamp et du Tréport) associant également le port de Saint-Valéry-en-Caux, est appelé à évoluer en 2024, avec une sortie du modèle de concession au profit d’une gestion plus directe via le Syndicat mixte créé en 2023.
Faire de la Seine-Maritime un département attractif
Pour faire valoir ses atouts, le Département peut s’appuyer sur plusieurs structures relais qu’il accompagne financièrement comme Seine-Maritime Numérique (SMN), qui a piloté la couverture fibre du territoire achevée depuis la fin 2023 (250 000 euros), l’agence Seine-Maritime Attractivité (SMA), dont la mission est de mettre en valeur les richesses du territoire (2,5 millions d’euros) ou encore le Syndicat mixte pour la promotion de l’activité Transmanche qui gère la liaison ferry avec la Grande-Bretagne (plus de 26 millions d’euros).Un Département ouvert aussi à l’international
Enfin, le Département de la Seine-Maritime n’est pas seulement engagé sur son territoire. Depuis plus de 40 ans, il mène ainsi des actions de coopération internationale au Burkina Faso, dans la province du Bam qu’il entend maintenir en dépit du contexte de tension politique. 700 000 € sont ainsi reconduits dans ce budget primitif pour mettre en œuvre notamment des projets relatifs à l’eau potable déjà engagés.Plus récemment, une coopération s’est mise en place avec la région du Kef, au nord-ouest de la Tunisie, et depuis 2019, un partenariat a été initié avec plusieurs municipalités au Liban, pour lesquels un montant de 200 000 euros est inscrit dans ce budget.
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